vendredi 8 janvier 2010

Dictionnaire franco-touareg hybride

Il existe des termes utilisés par les Touaregs, issus de la langue française, mais transformée avec l'accent Touareg.
Petit jeu, à vous d'en trouver la signification d'origine. Ceux qui savent déjà ne soufflent pas aux autres. C'est parti:

chambrillère
la chatma
sambrillage
chorfeta
el bidoune
la cousina
el cajo
el cartouna
les zalamètes
al brica
triciti
al for
choufage
chlata

à vous de jouer.

Les femmes

Mercredi soir, Tidouel m'a invitée à venir manger avec elle. Je ne l'avais pas vue depuis samedi. Elle me manquait déjà. J'arrive en fin d'après-midi, pas assez vite au goût de Tidouel puisqu'elle m'avait appellée vers 17h30 pour me rappeler que je venais chez elle le soir... Avant le repas, Ata passe dire bonjour. Elle nous invite alors à venir prendre le thé chez elle après manger. Alors, Tidouel accélère les choses. Nous mangeons toutes les deux, vite, vite. Ceci pour profiter du thé chez Ata. Le thé ici, c'est une religion. Un proverbe Touareg dit que pour faire un bon thé, il faut des braises, du temps et des amis. Ca résume très bien les choses.
Nous arrivons chez Ata. Dans la pièce des femmes se trouvent Zohara, la soeur de Ata, qui m'avait fait le henné avec Tidouel, et trois des vieilles femmes de Djahil, Tella, la mère de Tidouel, Nanie, et une autre que je ne connais pas. Quand je rentre dans la pièce, ce sont des grand "Aicha!".
Et la soirée commence, au rythme du thé. Le premier fort comme la mort, le deuxième doux comme la vie, et le troisième sucré comme l'amour. Doucement, doucement, au rythme de la théière qui chante. Part-terre de femmes, proches, intimes et soudées. Elles sont toutes soeurs, mères, filles, cousines. Une grande famille, unie. Djahil, ce quartier que j'aime tant, où tout le monde est tellement soudé. Si une famille rencontre des difficultés, les autres familles vont l'aider. Apporter à manger, partager la nourriture, aider pour les tâches ménagères, la garde des enfants. Un quartier, comme une grande maison.
Je me sens bien avec ces femmes. Elles m'ont complètement intégrée, acceptée telle une des leurs. Ce sont des instants intimes, des éclats de rire, de la complicité.
La vieille femme que je ne connaissais pas me donne les noms des constellations, le nom Touareg de chacun des sept étoiles des Pléiades. Les jeunes filles apprennent des mots Touaregs qu'elles ne connaissaient pas, remplacés par des termes arabes chez la jeune génération. Je suis heureuse de faire le lien entre elles et de relancer leur curiosité sur leur langue d'origine.
Cette soirée, alors qu'il fait froid dehors, m'aura apporté tellement de chaleur dans le coeur. Le bonheur des choses simples, des instants précieux.

lundi 4 janvier 2010

Tailleur

Courant Décembre, je voulais acheter une tenue un peu traditionnelle. Impossible de trouver quelque chose qui me plaisait ou quelque chose à ma taille.... Les tenues de femmes étant en taille unique, la seule réponse du vendeur a été, tu es trop maigre....

Alors, je suis allée chez le tailleur pour faire faire une tunique, aux formes et motifs mélangés. Tissu des pantalons des hommes, broderies aux couleurs de hommes, mais aux motifs féminins, encolure à ma sauce, manches style Niger mais en trois-quarts pour faire un peu "chiki" comme on dit ici.

Chez le tailleur sont exposées les tenues traditionnelles des hommes, en tissus de couleurs éclatantes, avec des motifs en surimpression.
Nous définissions ensemble les formes et les zones de broderies, à l'aide d'un petit shéma sur son cahier.
Il va travailler sur sa vieille machine à coudre, sans électronique et robuste! Demain soir, tout sera prêt.
Au mur, une sorte de papier peint mais qui a dû perdre sa peinture, se décolle, et sert de post-it géant, l'interrupteur aux couleurs locales, et l'éternel paquet de sacs plastiques poisons du désert.
















Le lendemain soir, ma tunique est presque prête. Je dois patienter dans la "salle d'attente", chaise bancale à côté de la machine à coudre, chaise qui a plusieurs vie derrière elle...

Encore quelques finissions, fer à repasser pour que tout soit impeccable. Le travail est bien fait, et j'aime avoir la surprise de la touche de l'artiste lui-même. Le petit shéma transformé en belle tunique me convient à merveille.

Portrait d'enfant

Semira, soleil de cette soirée improvisée

Ma bague

Lors de mes pérégrination Djanetiennes, je me promène souvent au souk. Là-bas, il existe 3 boutiques de bijoutiers. Ils sont tous frères ou cousins, originaires du Niger. Je passe des heures à les regarder travailler. Au fil du temps, je le ai tous rencontrés. Dans ces lieux, je suis Aicha et connue sous ce nom. Lorsque je passe devant une de leur boutique, ils m'appellent et je n'en ressors que plusieurs heures après.
Je me suis finalement décidée à acheter une bague. Une des bagues de Mohamed me plaisait, mais j'aurais aimé changer quelques petites choses. Il me propose alors de dessiner la bague de mes rêves et la réalisera sous mes yeux. Nous nous mettons d'accord sur les zones d'argent, les zones d'ébene. Quelles gravures et quelle méthodes utilisées (tourne vis ou tapé). L'établi du bijoutier est un bloc en métal posé à même le sol. Il utilise un petit creuset et un chalumeau branché sur une bouteille de gaz pour faire les soudures de métal, ou chauffer le métal pour le rendre plus maléable. La salle d'attente est juste a côté, équipée de son éternelle théière, et cacahuètes à déguster en buvant le thé.



Mohamed commence par fabrique l'anneau de la bague avec un motif créé avec la méthode du tapé. Il va ensuite fixer une plaque d'argent sur cet anneau, en ajoutant 2 petits anneaux de chaque côté. Il m'explique que c'est le cadenas, comme un verrou pour que la bague tienne bien.
Tous ces assemblages se font avec le chalumeau, et l'argent noircit dans la flammes. Nettoyage de la pièce avec un acide pour enlever le noir... à même le sable, sans protection. Il va ensuite limer, poncer la bague en argent. Réalisation des motifs de la bague elle-même. Un cercle d'ébène dans lequel il va incruster de l'argent, qu'il va ciseler, graver, avec un tourne-vis. Il assemble les 2 pièces pour former cette bague que j'aime tant. A chaque gravure, il me demande ce que je veux, nous partageons nos idées. Quel plaisir de voir la pièce naitre dans ses doigts.

A l'arrière de la bague, il applique sa signature en Tiffinagh, qu'il a appris par coeur, car il ne connait pas cet alphabet qui est pourtant celui de ses ancêtres. Je lui demande d'ajouter mon message à moi également. Pièce unique, née d'une création commune.





Un henné pour la Sebeiba

La fête de la Sebeiba, c'est samedi. Tidouel me propose donc de me faire un henné pour l'occasion.
Rendez vous le mardi précédent la fête. Nous prenons le repas du midi rapidement, un grand travail nous attend. Zohara est des nôtres également. Avant de manger, Tidouel prépare le henné. Poudre de la plante, un demi citron pressé, un peu d'eau, un peu de sucre. Elle mélange bien cette mixture, l'enveloppe dans un sac plastique noir et le place au soleil.
Vient ensuite le choix des pochoirs qui serviront à créer les dessins. De nombreuses discussions s'établissent entre les filles, non celui-ci ira mieux sur les pieds, celui-là pour les mains.
Collage sur les pieds dans un premier temps.
Tidouel me propose de mettre des dessins sous les pieds pour que ce soit visible quand je suis assise. La touche de l'artiste.
Me voilà parée pour l'enduit de henné. Chacune s'occupe d'un pied, je suis calée entre de nombreux coussins pour tenir la position pendant qu'elle étalent le henné. Une fois le henné placé, elles entourent les pieds d'un sac plastique, un morceau de mouchoir en papier fera l'affaire pour le dessin sur le pied, afin de le préserver d'éventuelle coulure.
Tidouel voulait également me faire un henné sur le mollet, pas facile de trouver la position du pochoir pour qu'il soit bien visible, joli, et que mes jambes supportent la position.

Après les pieds, les mollets, nous passons aux mains, doigts... et avant bras. Rediscussion pour le choix des pochoirs. J'ai hâte de voir le résultat.
Il est environ 14h lorsque les pieds et mollets sont terminés, 15h pour les mains. Je dois maintenant laisser infuser, dans la chaleur et l'humidité des sacs plastiques. Tidouel m'allume la télévision pour que je patiente. Et de la patience, il va m'en falloir. En effet, les filles vont commencer à m'enlever les pochoirs vers 20h30. Le résultat semble superbe, mais je n'ai pas le droit de regarder avant le nettoyage complet du henné restant.

Superbe. J'adore! Je sais que je ne vais pas beaucoup dormir ce soir, car je vais passer mon temps à regarder mes mains et mes pieds....

Portrait d'enfant

Aicha fille de Bachir